Article original
Apport de l’IRM cérébrale dans une série de 58 cas de malade lupique avec ou sans manifestations neuropsychiatriquesMRI of central nervous system in a series of 58 systemic lupus erythematosus (SLE) patients with or without overt neuropsychiatric manifestations

https://doi.org/10.1016/S0248-8663(03)00265-0Get rights and content

Résumé

Propos. – L’atteinte cérébrale du lupus est fréquente et peut être évaluée par l’imagerie par résonance magnétique (IRM). L’objectif principal de l’étude était d’évaluer l’atteinte cérébrale des patients lupiques avec ou sans signes neuropsychiatriques. L’objectif secondaire était d’analyser la corrélation entre les anomalies IRM observées et les anomalies cliniques et/ou biologiques de ces patients.

Méthodes. – Nous avons corrélé les données cliniques et biologiques de 58 patients ayant un lupus défini selon les critères révisés de l’American College of Rheumatology (ACR) dont 30 avec des manifestations neuropsychiatriques répondant aux critères de l’ACR aux résultats des séquences conventionnelles et modernes de l’IRM (diffusion, T1 haute résolution). La population étudiée a été comparée à un groupe de 18 sujets sains.

Résultats. – Dans 69 % des cas l’IRM encéphalique des sujets lupiques était anormale, que les patients présentent des signes neuropsychiatriques (73,3 %) ou non (64,3 %) : micro-infarctus, accident vasculaire en relation avec des anticorps antiphospholipides, hypersignaux T1 des noyaux gris centraux, atrophie, dépôts d’hémosidérine aux jonctions cortico-sous-corticales en T2* et plages de démyélinisation postérieure associées à un élargissement des espaces périvasculaires.

Conclusion. – L’IRM cérébrale avec des séquences adaptées objective des anomalies cérébrales dans approximativement 70 % des cas chez les malades lupiques ayant ou non des manifestations neuropsychiatriques.

Abstract

Purpose. – Central nervous (CNS) involvement in SLE is common and can be evaluated with MRI. The primary goal of this study was to evaluate with high-field MRI the CNS involvement in a series of SLE patients with or without neuropsychiatric symptoms. The secondary goal was to detect a possible relationship between MRI and clinical or biological parameters in SLE.

Materials and methods. – We correlated the clinical and biological parameters of 58 patients with a lupus defined according to the American College of Rheumatology criteria, including 30 with neuropsychiatric manifestations with conventional and modern MRI (including diffusion weighted-images, high-resolution 3D T1 weighted-images). The population studied was compared to a group of 18 normal controls.

Results. – In 69% of cases, MRI demonstrated involvement of the CNS both in asymptomatic patients (64.3%) and in patients with neuropsychiatric manifestations (73.3%): microembolic signals, cerebral infarctions (associated with the anti-phospholipid syndrome), atrophy, basal ganglia involvement, posterior leucoencephalopathy, subcortical calcification or hemosiderin deposits (T2*), dilated perivascular spaces.

Conclusion. – MRI with adapted sequences clearly demonstrated the cerebral involvement in approximately 70% of SLE patients with or without neuropsychiatric symptoms.

Introduction

Le lupus érythémateux systémique (LES) est caractérisé par l’atteinte multisystémique, en particulier neurologique [1] qui représentait encore il y a une vingtaine d’années 10 % des causes de mortalité. Le pronostic de la maladie s’est nettement amélioré depuis les années 1950 avec l’utilisation de la corticothérapie à forte dose et des immunosuppresseurs et ce sont à l’heure actuelle les complications cardiovasculaires (37 %) et les causes infectieuses (29 %) qui sont les principales causes de mortalité [2].

Globalement, la fréquence des manifestations neuropsychiatriques est diversement appréciée dans la littérature, avec des chiffres variant de 14 à 75 % selon les critères utilisés [3], [4]. Ces estimations très variables associent plusieurs explications : durée d’observation des patients, critères diagnostiques utilisés, mais aussi difficulté à discerner les atteintes neuropsychiatriques directement imputables au LES de celles causées par les traitements ou par des complications secondaires de la maladie. Il est difficile de faire la part entre le retentissement psychologique d’une maladie chronique et un trouble de la personnalité antérieure. Les deux principales manifestations observées sont les troubles psychiatriques et les troubles épileptiques, avant les manifestations centrales déficitaires, les céphalées, les atteintes de paires crâniennes, les méningites et enfin plus rarement les mouvements anormaux et les atteintes du système nerveux périphérique. La survenue d’accidents vasculaires cérébraux transitoires à répétition ou définitifs doit faire rechercher un syndrome des antiphospholipides. Les atteintes neuropsychiatriques inaugurent la maladie dans 5 à 10 % des cas [5]. Il est enfin admis que les manifestations psychiatriques fonctionnelles n’alourdissent pas le pronostic vital, alors que l’apparition de signes neurologiques centraux déficitaires ou d’une atteinte psychiatrique lésionnelle est péjorative. L’atteinte anatomique cérébrale montre des zones d’atrophie corticale avec encéphalomalacie, infiltration des parois vasculaires avec prolifération intimale et dépôts fibrinoïdes, ainsi que la présence de microthrombivasculaires, sources de micro-infarctus [6], [7].

Le développement de l’imagerie médicale a permis de supplanter les études anatomiques grâce au scanner, et dès le début des années 1980 grâce à la résonance magnétique (IRM) [4], [8], [9], [10] qui permettent de faire un diagnostic plus précoce et d’envisager un traitement adapté (corticoïdes, cyclophosphamide et/ou anticoagulant). L’utilisation de certaines séquences IRM, notamment le Flair (Fast Low Angle Inversion Recovery) et les séquences en transfert de magnétisation [11] augmentent la sensibilité de détection des anomalies de la substance blanche [12]. La fréquence des anomalies IRM observées chez les patients ayant un LES avec des signes neuropsychiatriques est diversement appréciée variant de 54 [13], [14], [15] à 81 % [16]. Les anomalies IRM sont présentes chez 15 [13], [17] à 50 % des patients asymptomatiques.

Notre objectif était de faire une analyse fine des anomalies mises en évidence sur l’IRM encéphalique des sujets présentant un LED, ayant ou non des symptômes neuropsychiatriques et de comparer les résultats à ceux d’un groupe de sujets témoins, de façon à déterminer la fréquence et la nature des lésions observées. L’objectif secondaire de l’étude était de corréler les anomalies IRM observées et les anomalies cliniques et/ou biologiques.

Section snippets

Sélection des patients

Il s’agit d’une étude rétrospective fondée sur l’analyse des IRM encéphaliques de 58 patients suivis pour un LES par des services de médecine interne et de rhumatologie. Les IRM ont été réalisées sur une période de huit ans entre décembre 1993 et janvier 2002.

Pour être inclus, les patients devaient satisfaire au moins quatre critères de la classification clinicobiologique révisée pour le lupus érythémateux systémique de l’American College of Rheumatology (ACR) [18].

Population étudiée

En fonction des données de

Caractéristiques de la population étudiée

L’âge moyen lors de la réalisation de la première IRM était de 39 ans (médiane : 36 ans). Le sex-ratio était de 7 hommes pour 51 femmes. La durée moyenne d’évolution de la maladie à partir des premières manifestations imputables au lupus lors de la réalisation de l’IRM était de six ans (médiane : 2,5 ans ; étendue : un mois à 35 ans).

Les principaux antécédents personnels auto-immuns étaient représentés par un cas d’hypothyroïdie par thyroïdite d’Hashimoto, trois cas de syndrome de

Discussion

L’IRM cérébrale a objectivé dans environ 70 % des cas des anomalies intraparenchymateuses aussi bien chez les sujets lupiques présentant des troubles neuropsychiatriques que chez ceux qui n’en présentaient pas, et celles-ci de façon significative sont plus fréquentes par rapport à un groupe témoin de même âge et de même sexe. Ceci est probablement dû à la diffusion de la maladie lupique, et on peut penser que les lésions cliniquement silencieuses sont, soit trop petites, soit situées dans des

Conclusion

L’IRM cérébrale avec des séquences adaptées (Flair, écho de gradient T2) objective l’atteinte cérébrale du lupus dans approximativement 70 % des cas, chez les sujets symptomatiques (manifestations neuropsychiatriques) ou non. Des anomalies IRM ont été observées chez tous les patients qui avaient un syndrome des antiphospholipides. La présence d’hypersignaux T2 et l’élargissement des espaces périvasculaires est significativement plus fréquente par rapport à un groupe témoins sains, et reflète

Références (33)

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      2016, Academic Radiology
      Citation Excerpt :

      White matter T2 signal changes are also a relatively common finding in cognitively healthy elderly (11). Although the distinction between NPSLE and SLE is based on the ACR criteria, it has been postulated that cerebral pathology can be identified in SLE patients without any neuropsychiatric conditions (non-NPSLE patients) that may be associated with milder forms of neurologic changes (12). It has not yet been established whether these imaging findings are associated with overall survival years of the disease.

    • Neuropsychiatric systemic lupus erythematosus: Tools for the diagnosis

      2014, Autoimmunity Reviews
      Citation Excerpt :

      Common abnormal cMRI findings in both SLE and NPSLE range from nonspecific small punctate focal lesions in the white matter (observed in the majority of patients with NPSLE but not specific to it) to more severe possibly fatal findings, such as cerebral infarctions, cerebral oedema, intracranial haemorrhage, acute leukoencephalopathy, diffuse WM abnormalities, focal atrophy, cyst formation, ventricular dilation, occasionally extensive parenchymal calcifications consistent with Fahr's disease (cerebral calcinosis) and cortical atrophy [73]. Numerous studies have described cerebral atrophy in patients with SLE and NPSLE [76–78]. Recent studies have not only shown changes in regional brain morphology in acute NPSLE, but also in SLE, which might be indicative of a subclinical neurodegenerative process [26].

    • Diminished white matter integrity in patients with systemic lupus erythematosus

      2014, NeuroImage: Clinical
      Citation Excerpt :

      In clinical practice brain imaging is often not part of the routine work up of non-NPSLE, possibly leading to an underestimation of CNS disease. Some authors, using MR imaging, have found evidence for small emboli, cerebral infarctions, hemosiderin deposits, and dilated perivascular spaces in up to 60% of non-NPSLE patients, strongly suggesting cerebral involvement in at least some of these patients (Cotton et al., 2004). Along these lines spectroscopy studies have reported decreased NAA levels, indicative of axonal dysfunction/damage, in SLE patients with active disease, independently of CNS manifestation (Sundgren et al., 2005; Appenzeller et al., 2005; Cagnoli et al., 2013).

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